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la nuit gagne à tous les coups
19h40 les adieux (trois générations devant le portail, à la fenêtre, au balcon, coucous, et ça fait quatre avec moi au volant, ciel dégagé), 19h45 station essence (trois types en treillis et jeeps + remorque kaki avec étoile blanche US, Ray-Ban et Marcel blanc, fument en attendant que les pompes se libèrent et débriefent sûrement leurs poumpoum du week-end), 20h L’Enclave derrière (la mort qui rode, la mémoire qui fuit, la peur de la bascule), l’Ouest devant (le bébé féminin qui prend ses aises dans le ventre) et dedans les pensées ricochent (temps confondus, visages neufs ou ridés, prêts à sourire ou à se figer), 20h10 vers la nouvelle gare TGV (écoute de la musique électro, groupe inconnu, CD oublié par A. le week-end dernier), 20h40 campagne haute-saônoise (pare-brise dégueux, soleil en pleine face), 21h en direction de Vesoul (nettoie le pare-brise près d’une fontaine, change de CD : Psychopharmaka) (à prononcer avec l’accent suisse-allemand) de Cadiot et Burger, roule des clopes), 21h30 le panneau dit « suivre Langres » (chante Eisbär entre deux sandwiches, me fais flasher par un radar alors que le soleil se couche), 22h arrive sur l’autoroute A5 dite Autoroute de l’Est (pause en tous genres + textos & Instagram, ciel toujours bleu, la lumière décline, la nuit gagne à tous les coups), 22h30 quelque part vers Bar-sur-Seine, entre chien et loup (changement de CD : Du ciment sous les plaines de Noir Désir), 23h près de Troyes (premiers feux d’artifice à gauche et à droite, premières visions floues, me dis : tu écoutes toujours les mêmes musiques, change de disque), 23h et quelques, dans le tunnel des jours à proximité de Montereau (Autobahn de Kraftwerk, premiers bâillements, clope vitre ouverte), un peu avant minuit, Francilienne pas loin sans doute (marre des doubles et triples voies, envie de voix qui ne parleraient que pour moi, trouve une rediff d’une fiction sur France Culture, Le xylophoniste des seins, une rêverie sensuelle sur Ramón Gómez de la Serna, nuit noire, dernière photo, encore une petite heure de route, repense aux questions de M., toujours les mêmes, à sa main qui tire le rideau, à ses yeux hagards, à son absente présence, elle si douce si douce, deuxième mère, l’animal qu’elle devient mord désormais ce qui nous reliait, comme la nuit vient mordre mes paupières).
_photos prises au hasard sur E27, N19, A31 et A5 le dimanche 14 juillet 2013 de 20h30 à minuit environ, de la main droite, sans quitter le volant, main gauche, ni la route des yeux
écrit ou proposé par Christophe Grossi - @christogrossi
(site sous licence Creative Commons BY-NC-SA)
première mise en ligne
et dernière modification le vendredi 19 juillet 2013