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Laurent Herrou | Avant | 20 juillet 2003
Dimanche après-midi, retour de chez Éric et Cécile, puis de chez les parents de Jean-Pierre. Sylvain souffre de la chaleur, il a chaud, sa respiration est saccadée, de faible amplitude. Je ne dis pas à Jean-Pierre ce que Jean-Pierre sait déjà : que l’état de Sylvain est inquiétant, que je le trouve trop fatigué. Je ne le dis pas, cela fait comme un frisson dans tout mon être quand je le regarde, le père, cela fait comme lorsque je regarde un film dans lequel quelqu’un souffre, que je me mets à sa place, je tente d’imaginer. Un frisson, un truc glacé, comme le hérissement de mes poils, et la chair de poule quand quelqu’un se brosse les dents. Je ne dis pas. Je garde pour moi, la sensation, et le regard de Sylvain dans mes yeux : il a acheté une bouteille de Pastis, il me la tend. Je remercie, il dit : elle vous était réservée. Il y a une complicité, une amitié possible qui n’aura peut-être pas le temps de se développer. Dans la voiture je me dis que je n’irais pas à l’enterrement. Je ne vais pas aux enterrements, les enterrements, je ne sais pas faire. Cela me fait de la peine – une peine identique à celle de Jean-Pierre quand il n’a pas pu aller à l’enterrement de ma grand-mère bretonne, ou quand il projette son absence à celui de mon autre grand-mère. La cause est extérieure à lui, cependant : mes parents. Dans le cas de Sylvain, la cause, c’est moi-même. Je ne peux pas, ou ne veux pas, ou ne veux plus. Ou ne peux plus. Niet. Hors de question, plus jamais. Mourez, je penserai à vous. N’en demandez pas plus.
Dimanche, et la chaleur, insupportable – que l’on supporte pourtant, en plaintes constantes : c’est la première année que je souffre autant de la chaleur. Jean-Pierre est sous la douche, moi il me faut d’abord m’envelopper le bras (et le plâtre) dans un plastique, que je fixe avec un élastique, autant dire que c’est super chiant. Je transpire plus à l’idée de ce qu’il faut faire pour prendre une douche qu’en ne faisant rien – et en oubliant l’idée de la douche. Mes cheveux sont longs, cela n’aide pas. Mais…
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J’ai terminé les corrections de la première partie de Femme qui marche, à ce rythme-là, l’ensemble sera revu demain, au plus tard mardi. Je suis heureux, je crois, que ça se passe vite, et bien. Je travaille, je sais travailler. Pour le prochain livre, ma publication. Femme qui marche, mon prochain livre.
Sourire, immanquablement.
_résidence Laurent Herrou | Avant | 20 juillet 2003
écrit ou proposé par Christophe Grossi - @christogrossi
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première mise en ligne
et dernière modification le dimanche 15 septembre 2013