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ecce homo urbain
Ecce homo, à l’angle de la rue Désiré Préaux et du boulevard Chanzy.
Nous avons une affaire importante à régler.
Ecce homo, à la Croix de Chavaux.
Moi c’est moi oui moi là l’homme du moment n’avez qu’à tourner un peu la tête.
Ecce homo, à Robespierre.
Cet homme qui bouffe sa propre merde.
Ecce homo, rue des Boulets.
Nous ne sommes pas des monstres.
Ecce homo, au pied des Mercuriales.
Non moi c’est moi mais poussez-vous c’est moi vous dis-je.
Ecce homo, Place Gambetta.
Nous n’allons pas vous étriper.
Ecce homo, à Charonne, à Alésia, sur les Grands Boulevards.
Ils ne sauraient pas dire si leur vie est en danger.
Ecce homo dans les ascenseurs.
Comme le merle sur la terrasse, pas rassuré.
Ecce homo, à la sortie.
Comment pouvez-vous, je me suis autoproclamé le premier, n’aviez qu’à y penser plus tôt.
Ecce homo, nos corps crient ça souvent, à tour de rôle.
M’en tamponne de votre messe dite.
Ecce homo, au rayon surgelés du Monoprix.
Voici le futur crucifié version post-moderne.
Ecce homo, à l’Hôtel-Dieu.
Plein de crucifiés partout. Des avatars de crucifiés.
Ecce homo, devant la Chapelle Marie Mère de Dieu.
Qui ne sont que l’autre d’eux-mêmes : ça se complique.
Ecce homo, dans les catacombes.
Personne ne les écoute.
Ecce homo, au Val de Grâce.
Foule écœurée de ces bouches qui s’ouvrent de travers, voix trop fortes, trop aiguës.
Ecce homo, au Père Lachaise.
Foule indisposée par la scène rejouée.
Ecce homo, devant le Sénat.
Foule haranguée, disputée et qui n’est pas sourde.
Ecce homo, à la BNF.
Moi c’est moi et plutôt deux fois qu’une.
Ecce homo, près d’une cabine téléphonique.
Je vous poncepilate à jamais.
Ecce homo, rue de la petite Truanderie.
Des siècles que j’attends ça, me taire désormais non.
Ecce homo, rue des Bons-Enfants.
Nos corps bien seuls à présent face à leur poème.
Ecce homo, sur le périfluide.
Moi c’est moi la tête tourne et qui tourne dans le sens des aiguilles d’une montre personne ne me contredira l’échéance : parler, faut dire.
Ecce homo, dans le parc des Guilands.
L’homme du moment, c’est moi, il a deux mille ans ou presque et il n’a pas fini de se prendre le pied dans ceux de la table de la cuisine, de saigner du front, de se casser la clavicule, de déchirer ses habits, de s’écorcher le téton, de se faire tondre la barbe par des animaux ivres, de déchirer son enveloppe, de se faire marcher sens dessus dessous, de rouler à gauche pour aller sniffer la bande d’arrêt d’urgence, de cavaler loin des points de croix et des madeleines de Proust, de jeter sa gourme à celui qui lui donnerait le bon dieu sans confession.
Ecce homo, dans les ornières.
C’est moi je suis Dita Kepler c’est de là que je viens.
Ecce homo, au feu orange clignotant.
C’est moi celui que vous n’attendiez plus puisque vous n’avez jamais cru à cette histoire.
Ecce homo, devant les Invalides.
Ecce homo, au Jardin des Plantes.
Il est passé par ici il ne repassera pas par là.
Nos corps en nage et prêts à en découdre.
Ecce homo, dos contre mur, boulangerie fermée.
Deux mille ans après ou pas loin.
Ecce homo, sur le chemin de ronde.
Il nous reste vingt-deux ans pour y parvenir.
écrit ou proposé par Christophe Grossi - @christogrossi
(site sous licence Creative Commons BY-NC-SA)
première mise en ligne
et dernière modification le mardi 14 décembre 2010