christophe grossi | lirécrire

Accueil > f(r)ictions > archives > corps pluriels > je ne suis pas Christophe Sanchez

je ne suis pas Christophe Sanchez


 
Je suis plusieurs villes dans le monde qui ne figurent dans aucun guide dont les bois dissimulent des dizaines de cadavres d’enfants et des clandestins qui ne sont jamais arrivés à destination.
Je liste le nombre de personnes tuées, abattues, blessées, disparues à chaque flash d’information.

Mon activité principale est d’abattre les tueurs des autres cartels.
Je collectionne les dommages collatéraux.
Et n’aime pas ce que nous sommes.

Je ne suis pas Christophe.
 
 
Je suis le nombre d’heures supplémentaires jamais rémunérées mais compensées.
Le nombre de licenciements économiques par anticipation.
Le pourcentage de demandeurs d’emplois qui monte et descend selon qui a fait les calculs et comment il les a faits.
Le programme dont la spécificité est de vous adresser, pour des raisons connues de ceux qui m’ont créé, des courriers de radiation.
Je vaux trois milliards de déficit et je continue de chauffer le département.
En achetant l’Amérique du Sud, j’ai détrôné Bill Gates.
I’m the man who sold the world.

Je ne suis pas Christophe Claro.
 
 
Je suis la peur de l’homme abdominal qui s’est magnifiquement vengé de son ex sur Facebook.

Je penchais sans passé pour les femmes mais la mienne, je l’ai rencontrée au troisième étage, dans la vaisselle.
Maintenant je la bats, aux cartes.

Je ne suis pas Christophe Donner.
 
 
Je suis le nombre d’éjaculations précoces et d’orgasmes simulés.
Le nombre de pénis élargis, de vies sexuelles épanouies, de loteries remportées.
Le nombre de problèmes de transactions, de virements, de prélèvements bancaires, de codes erronés.
Le nombre d’informations urgentes à modifier, de liens à suivre scrupuleusement.
Le nombre d’amis du bout du monde qui vous veulent du bien.
Je spamme les pommes.
Je catche les coachs.
Je tombe à pic.

Je ne suis pas Christophe Fiat.
 
 
Je suis la roue avant du vélo du meilleur grimpeur dont la spécificité est de crever dans la descente du Ventoux.
Je n’ai pas écrit que je pourrais vivre à l’envers.
J’organise des formations en entreprise sur les accidents de plain-pied.
Je suis présent sur vos photos de vacances, sur chacune de vos vidéos amateurs.
Et vous croise tous les matins au même endroit, à quelques dizaines de mètres près.

Je ne suis pas Christophe Fourvel.
 
 
Não sou nada.
Né aux calendes grecques, je n’ai pas marché dans l’atelier du sculpteur.
Nunca serei nada.
J’étais « le petit piano dans la tête » qui riait dans les cimetières.
Não posso querer ser nada.
Je serai le dernier des hommes sur lequel personne n’aura rien misé.
A parte isso, tenho em mim todos os sonhos do mundo.
J’en savais trop.

Je ne suis pas Christophe Sanchez.


Ce texte a été publié une première fois le 1er octobre 2010 sur le blog de Christophe Sanchez lors des vases communicants.

 

écrit ou proposé par Christophe Grossi - @christogrossi
BY-NC-SA (site sous licence Creative Commons BY-NC-SA)
première mise en ligne et dernière modification le jeudi 21 octobre 2010